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Bibliothèque virtuelle Henri Labrouste

20 févrierDimanche. On ne travaille pas.
21 févrierJe suis venu aux travaux. Les maçons travaillent aux arcs du 1er étage au couchant, les serruriers continuent.
22 févrierJe suis commandé de service pour la Garde nationale. Je suis venu le matin avec la légion à la place du Panthéon1. J’ai vu qu’on travaillait mais je ne suis pas entré.
23 févrierJe suis venu un instant. On ne travaille pas. Le chantier n’a pas été dérangé.
24 févrierJe ne suis pas venu aux travaux.2
25 févrierJe suis venu un instant aux travaux. On ne travaille pas. J’ai vu les serruriers qui ne demandent qu’à travailler, ils doivent reprendre régulièrement demain.
26 févrierJe ne suis pas venu aux travaux.
27 févrierDimanche. J’ai passé la revue de la Garde nationale sur les boulevards3 et je ne suis pas venu aux travaux. Le soir j’ai reçu une lettre du ministère pour reprendre les travaux4.
28 févrierJ’ai écrit aux divers entrepreneurs pour reprendre les travaux. Je suis venu au chantier. Les maçons travaillent. 10 maçons et 10 garçons. 10 serruriers.
29 févrierJ’ai porté au ministère la lettre en réponse à celle du 26 qui ne m’est arrivée par la poste que le 27. J’ai vu M. Hermel et M. Guillemot. J’ai été aux travaux, on travaille. J’ai vu M. Durand qui m’a dit que les croisées du rez-de-chaussée occupaient 18 hommes aux ateliers. J’ai adressé le soir au ministère le rapport faisant connaître l’emploi de 14 maçons et 27 serruriers. En tout 41 ouvriers5.

1. Le rassemblement populaire d’étudiants et ouvriers parisiens, parti dès l’aube de la place du Panthéon suite à l’interdiction par Guizot du banquet réformiste du XIIe arrondissement, marque le début de la Révolution de 1848. Le banquet devait être présidé par le député Boissel (cf. f. 114, 7 décembre 1847). S’agit-il de la 11e légion (Palais de justice, École de médecine, Luxembourg, Sorbonne) ou de la 12e la plus révolutionnaire (Jardin du roi, Saint-Jacques, Observatoire, Saint-Marcel) [qui,] réunie presque au complet, occupa la place du Panthéon en chantant La Marseillaise ?  (J. BruhatLes journées de février 1848, PUF, 1948, p. 32).

2. [Ce même jour] Pierre Marie remplace Hippolyte Paul Jayr au portefeuille des Travaux publics dans le cadre du Gouvernement provisoire.

3.  Deux bataillons, par légion, de la garde nationale de Paris, tous les bataillons composant la garde nationale de la banlieue, les élèves de l’École-Polytechnique, ceux de l’École de Saint-Cyr, les élèves des écoles de Droit et de Médecine, ceux de l’École Normale et d’Alfort seront passés en revue par les membres du Gouvernement provisoire, et par le commandant supérieur de la garde nationale. [...] Les membres du Gouvernement provisoire et le général commandant supérieur, après avoir passé devant le front des bataillons, se reporteront de leur personne au pied de la colonne de Juillet. [...]Le Gouvernement provisoire y proclamera la République ; [...] les légions défileront autour de la colonne de Juillet et retourneront dans leurs quartiers respectifs. [Signé] Le commandant supérieur de la garde nationale, Courtais . Cité par Ch. E. H. Richomme, Journées de la Révolution de 1848 par un garde national, Paris, Janet, s.d., p. 141-142.

4.  Tous les travaux de bâtiments et édifices publics entrepris aux frais de l’État, à l’exception des travaux des forts, seront repris immédiatement. En conséquence, les entrepreneurs de ces divers chantiers sont mis en demeure de réorganiser leurs chantiers. Des acomptes sur le montant des travaux leur seront délivrés chaque mois en raison du degré d’activité qu’ils auront imprimé à leurs travaux. Paris, le 27 février 1848, [signé] Marie  (ibidem, p. 157). Labrouste note désormais scrupuleusement, jour après jour, le nombre d’ouvriers de chaque corps de métier présents sur le chantier.

5. Par la même occasion, Labrouste suggère que le chéneau de la façade, initialement prévu en pierre de vergelet, soit réalisé en « terre cuite blanche, dont il est fait aujourd’hui de nombreuses applications », réduisant ainsi la dépense de 10 208 à 6 300 F. L’architecte propose en outre d’établir  en fer les fenêtres du rez-de-chaussée au lieu de les établir en bois, et d’en confier l’exécution à M. Roussel, déjà adjudicataire des planchers et du comble en fer […]. Quant aux fenêtres du premier étage, elles seront en bois et pourront être exécutées par M. Mathérion   (Arch. nat., F/21/1364).